Dérogation à ses principes Une fable sociale de Brassens : Tous les "intervenants" de la chanson -- chauffeur n'ayant pas de temps à perdre, le flic "ayant d'autres chats à fouetter", le témoin intimidé ne suivant pas l'instinct grégaire face à la "foule qui se déchaîne", le curé défendant sa religion, le soldat formé pour tuer, la religieuse vouée à la chasteté, et enfin le voisin mécréant ne voulant pas convaincre son voisin de l'absence de Dieu (on n'aura pas tort de voir ici le chanteur lui-même, mais seulement à titre d'exemple) -- ils méritent de la gloire pour avoir dérogé à leur principe face à un animal ou une personne en détresse... comme le machiste Don Juan qui, parmi toutes ses aventures, fait l'amour à une fille trop vilaine POUR elle, par pitié...
La morale est claire : faut pas juger une personne par ses paroles ("il me la faut"), mais par ses actes, ce qui implique qu'il faut regarder ces actes du point de vue de cette personne elle-même (et non par ses propres principes), c'est-à-dire, nous en tant qu'auditeurs, devons également oublier nos principes pour comprendre cette chanson. [contact auteur : Ralf Tauchmann] - [compléter cette analyse]
Complément [Lu sur le forum des Amis de Georges, Martin PAIX]
"Comme souvent, afin de comprendre ce vers/refrain issu de la chanson de GB "Don Juan", il convient de le replacer dans son contexte. De quoi s'agit-il dans cette chanson ? GB y chante les louanges de ces gens de peu, néanmoins pleinement humains, en quelque sorte "héros" du quotidien : celles du type qui "freine à mort" pour laisser la vie du hérisson sauve, celles de la bonne-soeur qui, prise de compassion, va - à l'encontre de la moralité prescrite par son église - "soulager" l'invalide à la force du poignet etc.
GB, prenant ici à nouveau le contrepied des idées reçues, place les exploits amoureux de Don Juan et de ses semblables sur le même plan que les B.A. de ces héros anonymes ; le donjuanisme, habituellement perçu comme une tare et décrié comme tel ("bourreau des coeurs"...), a aussi ses vertus, nous enseigne Brassens. En effet, qui en dehors du collectionneur de femmes insatiable, du coureur de jupons compulsif aurait des égards pour la femme généralement délaissée parce que peu séduisante, trop vieille (fille) ou carrément trop "vilaine" (nous y voilà) ? A y parier, sans doute pas grand monde... "Cette fille est trop vilaine, il me la faut" : GB s'amuse du fait que le critère de beauté n'entre pas en première ligne chez Don Juan, contrairement à celui du nombre (on n'entrera ici pas dans le détail de la psychologie de Don Juan). De là à vouloir séduire spécialement les laiderons, il y a un pas que GB franchit allègrement pour notre plus grand bonheur, l'effet comique ainsi généré étant redoutable(...)". [contact auteur]
Paradoxe Dans cette chanson, Brassens glorifie un flic, un curé et une bonne-soeur, personnages plutôt critiqués dans ses autres chansons. C'est peut-être une manière de montrer qu'il faut nuancer et ne pas tirer de généralités. [contact auteur : Florent L.] - [compléter cette analyse]
Complément Rappelons aussi le curé de La messe au pendu, chanson de ce même disque numéro 12, qui est exclu de la liste des "ecclésiastiques dégueulasses". [contact auteur : Alvaro Britto]
Des animaux méprisés Le hérisson et le crapaud sont des animaux qui, en général, n'attirent pas la sympathie des gens. Et pourtant, l'automobiliste de Brassens freine "à mort" pour ne les tuer. Je vois dans ce passage, en plus, une allusion de GB au poème de Victor Hugo, "Le crapaud", dont le premier vers est celui-ci:
"Que savons-nous ? qui donc connaît le fond des choses ?". [contact auteur : Alvaro Britto] - [compléter cette analyse]
Trop vilaine GB met à l'épreuve la chasteté prônée par l'Eglise au regard de la Charité que cette même Eglise place au-dessus de tout.
Pour lui, c'est une application de l'attention aux pauvres enseignée par Jésus, cela ne fait nul doute. D'ailleurs, c'est pour cela que les religieux ici sont particulièrement édifiants. La logique est décapante, mais elle se situe dans un cadre où l'union des corps n'a d'autre sens que le plaisir, ce que l'Eglise ne peut concevoir. Il n'empêche que "les bonnes âmes" sont forcément très dérangées par une telle audace. [contact auteur : Roger Martineau] - [compléter cette analyse]
Haro sur le baudet La Fontaine, dans Les Animaux Malades de la Peste (Fable 1, Livre VII). Fable à relire de toute urgence dans nos temps troublés. On se souvient de la morale: "Selon que vous serez puissant ou misérable
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir."
HARO! ce cri d'appel au lynchage serait d'origine normande. [contact auteur : Henri T.] - [compléter cette analyse]
Le massacre de la Saint-Barthélemy Dans la nuit du 23 au 24 août 1572, les protestants, réunis à Paris pour le mariage de leur chef Henri de Navarre avec Marguerite de Valois, sont massacrés. Catherine de Médicis et les Guises, qui redoutaient l'influence du protestant Coligny sur le roi Charles IX, décident de supprimer les princes protestants. Le massacre fait 3 000 victimes et Henri de Navarre n'en réchappe qu'en abjurant. C'est l'un des événements les plus tragiques des guerres de Religion qui ensanglantèrent le royaume entre 1562 et 1598. [contact auteur : Thiago M.] - [compléter cette analyse]
Se faire reluire Argot du XIXème, encore utilisé dans les polars de la Série Noire des années cinquante, sans doute cousin de "s'astiquer". Comprendre: jouir, arriver à l'orgasme. [contact auteur : Henri T.] - [compléter cette analyse]
Un idéal? Phrase (vers 31-32) proposée à des élèves de 16 ans dans le cadre d’une réflexion sur le sens de la vie. Ces 4 vers sont-ils porteurs d’un idéal ?
Approche sommaire du vocabulaire choisi, ébauche d’analyse. Sans prétention. Pardon Georges.
- gloire, idéal, sacro-saint : chant lexical religieux
- se borne : pas très ambitieux
- emmerder : langage familier
- ses voisins : l’autre ou les autres ?
Présentation de la chanson : mise en scène de gens ordinaires, qui, chacun à leur manière, se comportent hors clichés. Au nom d’une conception de l’être humain ou de l’autre en général. Davantage que de soi.
Se présente en négation. Double. Souvent, les pensées retenues comme maximes, comme devises sont affirmatives (à vérifier, mais a priori….)
Il faut la retourner pour la clarifier
Celui qui a un idéal sacro-saint a toutes les chances d’emmerder ses voisins. C’est pourtant celui-là qui souvent est glorifié. Puisque son idéal est reconnu par un grand nombre…(Au passage, "à plus de quatre"…). Qui n’a de cesse (que) de l’imposer aux récalcitrants voisins, proches ou moins.
Une religion révélée par exemple énonce des vérités, venues d’en haut, érigées en dogmes, incritiquables… Saintes. Sacrées. Qui, hélas, ont souvent servi à opprimer, persécuter, enfermer.
« Se borne » : pas un peu « petit bras » comme morale ? Quel est concrètement le projet de vie qui se cache là-derrière ? Mettons que ce soit un code éthique, cela influence-t-il la manière dont j’arrive à l’école, dont je me déplace dans les couloirs, dont je me comporte avec les autres ?
Qui sont ces voisins ? Ceux que le hasard met sur notre route ou ceux qu’on choisit ? (...)
Finalement oui. De quoi en faire l’incarnation d’une éthique personnelle libre proche de l’anneau de Gygès.
(D’un cours de religion d’une école liégeoise, Belgique). [contact auteur : Pom P.] - [compléter cette analyse]
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